À l’instar du Canada, la pandémie de COVID-19 a frappé la Sierra Leone en mars 2020. Cette maladie mortelle a constitué une grave menace pour les femmes, qui sont souvent celles qui prennent principalement soin de la maison, notamment de leur époux, leurs enfants et d’autres parents.
La crise d’Ebola a appris des leçons aux médias. En effet, cette maladie a emporté plusieurs femmes et enfants, car les premières ignoraient les répercussions qu’elle pouvait avoir sur leurs familles et elles-mêmes. À la lumière de leurs expériences, les journalistes entreprirent rapidement des campagnes de sensibilisation, dont certaines comportaient des messages destinés aux femmes. Cette approche permit aux populations de mieux se protéger contre la maladie.
Dans un pays à faible revenu comme la Sierra Leone, un fort pourcentage de femmes gagne son revenu en exerçant des activités informelles comme le commerce, les tâches ménagères et l’agriculture. Beaucoup n’auraient pas supporté les lourdes conséquences financières de la pandémie. Certaines entreprises ont été mises à mal, et d’autres ont fermé définitivement. La majeure partie des femmes fut privée de revenus durant cette période à cause des restrictions gouvernementales visant freiner la propagation de la maladie. Il y avait également un risque accru que les femmes qui travaillaient contractent le virus, car elles constituent 70 pour cent de la main-d’œuvre sociale et de la santé dans le monde. Ces travailleuses pouvaient à leur tour infecter les membres de leurs familles.
Les facteurs de stress économique, sanitaire et social de la pandémie de COVID-19, associés aux confinements et aux restrictions continues provoquèrent une hausse importante du taux de violence basée sur le genre. Des femmes durent fuir leurs maisons, abandonnant parfois leurs enfants pour épargner leur vie et rester loin de leur époux violent qui les maltraitait.
Les problèmes de santé mentale augmentèrent également, car les familles étaient incapables de subvenir aux besoins de leurs membres. C’était très difficile pour les femmes, dont la plupart soutiennent leur mari au niveau des charges financières de la maison. Celles qui n’arrivaient pas à subvenir aux besoins de leurs familles se sentaient angoissées et anxieuses à cause de leurs responsabilités parentales accrues.
Lien entre médias, genre et COVID-19
En juillet 2022, la Sierra Leone s’est associée à Radios Rurales Internationales et à 15 autres pays d’Afrique subsaharienne pour une campagne de sensibilisation sur la confiance à l’égard des vaccins, dans le cadre du projet VACS. Cette campagne était une mesure de santé publique visant à sauver des vies, financée par Affaires mondiales Canada. L’idée maîtresse consistait à mener une campagne d’information de trois mois pour concevoir et diffuser des messages sur le COVID-19, lutter contre la désinformation, renforcer la confiance à l’égard des vaccins, appuyer la demande (là où les vaccins n’étaient pas disponibles), et intégrer des émissions d’actualité et tenant compte du genre à l’échelle nationale pour toucher le plus grand nombre de communautés possible.
Vingt stations de radio communautaires participèrent à cette campagne. Elles ont diffusé chaque jour des émissions avec l’appui de Radios Rurales Internationales. Dans le cadre de ce projet, des discussions WhatsApp impliquant des spécialistes ont été organisées pour aider les radiodiffuseurs et les radiodiffuseuses à cerner la situation du COVID-19. Ainsi, ils pouvaient lutter contre la désinformation et les mythes et créer des messages pour augmenter le taux de vaccination dans leurs communautés respectives.
Yeama Thompson, rédactrice en chef de la Sierra Leone News Agency (SLENA) et directrice générale d’Initiatives for Media Development (IMdev), a salué la campagne VACS de Radios Rurales Internationales. Elle a exhorté les radiodiffuseurs à utiliser leur tribune pour sensibiliser les hommes et les femmes au COVID-19.
Yeama a cité un sondage réalisé récemment par son organisation, IMdev, en partenariat avec la London School of Hygiene and Tropical Medicine sur le thème « Comment les facteurs démographiques et socioéconomiques influencent les sources d’information des femmes sur le COVID-19 en Sierra Leone. » Cette enquête a révélé notamment qu’une grande partie de femmes obtenaient des renseignements de seconde main de leur époux ou de membres de leurs familles. Par conséquent, en tant qu’experte en genre, elle a imploré les radiodiffuseurs de bien faire comprendre que la radio restait la principale source d’information sur le COVID-19, et que les femmes pouvaient s’en servir pour s’équiper avec des informations précises et fiables.
La spécialiste du genre Millicent Kargbo a affirmé clairement que, même si les difficultés d’accès aux vaccins du COVID-19 ne concernent pas uniquement les femmes, ces dernières constituent le groupe le plus vulnérable. Les principales difficultés englobent les mythes et les idées fausses qui circulent sur le réseau Internet et ailleurs, le manque d’informations sur les centres de santé et les longues distances que plusieurs doivent parcourir pour accéder à ces services.
Selon Millicent, c’est là que les médias doivent intervenir : pour combattre les mythes et la désinformation et intégrer systématiquement l’égalité des genres dans leurs messages. Elle a ajouté que les propriétaires et les gestionnaires de médias devraient accepter que le genre joue un rôle fondamental par rapport aux répercussions du COVID-19 sur les gens, et prendre des mesures pour accorder la priorité aux questions de genre sur leurs plateformes médiatiques, en vue de fournir des informations vitales pour contrer la désinformation et les mythes.
Marie Bob Kandeh, la présidente de la Sierra Leone Market Women Association, a qualifié la campagne VACS de Radios Rurales Internationales « d’utile et d’actualité. » Elle a déclaré que grâce au soutien d’institutions comme le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), FOCUS 1000, le COVID-19 Emergency Response Centre (NaCOVERC) et ONU Femmes, son association a activement participé à une sensibilisation dans environ 40 marchés du pays durant le pic de la pandémie de COVID-19 en Sierra Leone.
Selon Marie, le processus de sensibilisation a été difficile en raison du manque d’eau, du refus des femmes de se laver les mains au marché et de la difficulté de toucher les commerçantes des districts, notamment pendant les confinements. Elle a lancé un appel pour le respect des vendeuses de marchés qui, dit-elle, sont souvent méprisées. Marie a ajouté que ces femmes peinent à obtenir les vaccins du COVID-19, car elles sont occupées et doivent se rendre dans les hôpitaux ou les centres hospitaliers publics pour se faire vacciner.
Durant une crise sanitaire comme la pandémie de COVID-19, les organes de presse à l’exemple des stations de radio sont indispensables pour aider les auditeurs et les auditrices à savoir ce que les membres d’autres communautés vivent et s’assurer qu’ils et elles ont les informations nécessaires pour rester en sécurité et en bonne santé et ne pas avoir des charges inutiles à porter.
Projet en bref
Le projet Communication à grande échelle sur la santé publique et les vaccins en Afrique subsaharienne pour sauver des vies, ou VACS, est financé par le gouvernement du Canada par l’entremise d’Affaires mondiales Canada. Dans le cadre de ce projet, Radios Rurales Internationales s’est associé à des stations de radio de 16 pays, avec lesquelles il a travaillé dans 20 langues d’Afrique subsaharienne pour appuyer les efforts de prévention du COVID-19, renforcer la confiance à l’égard des vaccins et promouvoir l’égalité des genres.
À propos de l’auteure
Mariama Sowe (née Bah) est une formatrice en médias et une professionnelle de communications pour le développement basée en Sierra Leone. Elle a été chargée de projet à Radios Rurales Internationales en 2020-2021 pour le projet « L’apprentissage à distance en période de crise » et chargée de réseautage en 2022 pour le projet VACS. Mariama est une journaliste professionnelle qui milite pour la promotion des droits de la personne dans les médias et la protection des femmes journalistes.