Des jeunes albinos, des peuples indigènes, des personnes vivant avec handicap et certains jeunes étudiants de l’Université de Goma UNIGOM ont célébré en date du 7 juin la journée de l’environnement en ville de Goma. Cette ville située dans la partie Est de la République démocratique du Congo est longtemps affectée par des éruptions du Volcan Nyiragongo, l’un de volcans les plus actifs au monde.
Durant la célébration de la journée de l’environnement, ces jeunes ont planté quelques arbres dans la Concession du Campus de l’UNIGOM. Une action qui rentre dans le cadre de renforcement de l’inclusion de toutes les couches de la communauté dans la protection de l’environnement.
Le changement climatique marque ses effets partout sur la planète terre. Entre augmentation de la température et perte de la biodiversité, les ressenties des communautés varient selon tel ou tel autre groupe des personnes.
En République démocratique du Congo RDC, des voix se lèvent pour renforcer l’inclusion des albinos, des peuples indigènes et des personnes vivant avec handicap à la cause du climat.
Risque de cancer de la peau chez les personnes albinos
Léa Ziraje, une femme albinos à Goma dans l’est de la RDC, est la coordonnatrice des albinos dans la province du Nord-Kivu. Au cours d’une interview au mois de juin 2022, elle indique que les personnes albinos souffrent durement avec ces fortes chaleurs qui s’enregistrent de nos jours.
«Nous sommes beaucoup plus des victimes. Il y a des endroits où l’on déboise les arbres. Pour nous les albinos, nous souffrons trop avec le soleil qui nous amène à trouver même des maladies de la peau telle que le cancer de la peau.
C’est très important de nous inclure dans les actions de lutte contre le réchauffement compte-tenu de ses effets qui pèsent sur nous », plaide ainsi Léa Ziraje lors de la célébration de la journée de la Biodiversité en ville de Goma.
Selon Aicha Diakité, Présidente de l’Association Solidarité pour l’Insertion des Albinos du Mali SIAM en sigle, le programme de prise en charge des cancers de la peau des personnes atteintes d’albinisme est d’une importance capitale.
Citée dans un article de la Fondation Pierre Fabre, Aicha Diakité indique que la survenue de cancer de peau est le risque majeur de santé que courent les personnes atteintes d’albinisme.
« Les tumeurs surviennent généralement chez les sujets jeunes (25-35 ans) qui n’ont pas accès aux soins médicaux et sont contraints de s’exposer au soleil à la recherche du pain quotidien », indique-t-elle.
Albinos et inclusion sociale
La Conseillère à la banque Mondiale pour les personnes handicapées Charlotte McClain-Nhlapo expliquait en 2015 que les personnes atteintes d’albinisme n’ont pas à être exclues simplement parce qu’elles ne ressemblent pas aux autres. Ce sont des acteurs du changement qui ont beaucoup de choses à apporter à la société.
Les personnes albinos constituent une minorité dans le monde soit 1 cas sur 15 000 en Afrique Subsaharienne selon les estimations de l’Organisation Mondiale de la Santé OMS.
Affectées par de nombreuses formes de discrimination : rejet, exclusion sociale, mythes erronés etc, les personnes albinos bénéficient d’une journée mondiale en date du 13 juin pour la sensibilisation à l’albinisme. Une journée pour assurer la prévention des agressions et la discrimination à l’encontre des personnes atteintes d’albinisme.
Les peuples indigènes et pygmées face au réchauffement climatique
Le Foyer de Développement pour l’autopromotion des Pygmées et Indigènes Défavorisées FDAPID en sigle, une organisation de défenses des droits humaines en RDC plaide pour l’amplification de l’inclusion des peuples indigènes aux questions de lutte contre le réchauffement climatique.
A travers son projet GLA « Green Livehood Alliance », le FDAPID et ses partenaires mettent en œuvre des actions de sensibilisation sur le réchauffement climatique en synergie avec des personnes à mobilité réduite, les albinos, les pygmées et les jeunes.
En marge de la célébration de la journée de l’environnement le 7 juin en ville de Goma, Mme Angélique Mayenga, Chargée du genre et des projets dans le programme GLA au sein du FDAPID, fait savoir que dans la plupart des cas, les pygmées, les personnes vivant avec handicap et d’autres personnes de groupes marginalisés ne sont pas suffisamment consultés lors de grandes rencontres sur le réchauffement climatique ou pour protéger l’environnement.
« Nous voyons déjà l’impact du réchauffement climatique. Nous vivons déjà ses conséquences. Par exemple, avec le calendrier agricole, avant, il était possible de connaître quand sera la saison sèche et quand est-ce que la pluie était attendue.
Ce dernier temps, il y a perturbation de calendrier agricole. Si c’est déjà difficile pour nous, nous qui avons la possibilité de trouver de l’emploi en ville, cela est plus compliqué pour ces peuples indigènes qui espèrent gagner la vie à travers des activités champêtres.
Leur économie est affectée et leur vie sociale bouleversée », alerte Mme Angélique Mayenga. Elle estime que la sensibilisation des groupes de personnes indigènes sur la protection de l’environnement assure non seulement leur inclusion sociale mais également à prévenir les dommages que la destruction de la biodiversité fait peser sur leur habitat naturel.
Il y a de cela 6 ans, Laurence Caramel, envoyée spéciale du journal Le Monde à New York rapportait que les peuples autochtones et les communautés locales sont aux yeux des climatologues de précieux alliés. Dans son article intitulé Dans le bassin du Congo, les pygmées, gardiens oubliés du climat, il est noté que la protection des forêts passe également à travers la protection des droits des peuples indigènes et des communautés forestières.
Le 14 juin 2022, la Commission paritaire (Assemblée nationale-Sénat) en RDC a adopté la loi portant protection et promotion des droits des peuples autochtones Pygmées dite « Loi-Pygmée ».
Cette loi sera transmise au Chef de l’Etat Félix Tshisekedi pour promulgation, rapporte DESK NATURE. La « Loi-Pygmée » permettra à l’Etat Congolais d’assurer l’intégration des peuples autochtones pygmées dans la vie nationale, la sécurisation de leurs terres et terroirs ancestraux sous forme de grandes réserves naturelles et écologiques afin de protéger leur identité et mode de vie traditionnelle, note Auguy Mudiayi de DESK NATURE.
Personnes à mobilité réduite et lutte contre le réchauffement climatique
A Goma, chef-lieu de la Province du Nord-Kivu, dans l’est de la RDC évolue un groupe d’artistes musiciens vivant avec Handicap. Le groupe Power Boys contribue à vendre une image positive des personnes à mobilité réduite.
A travers la musique, Mr Riziki Tawamo, de son nom d’artiste RIZO-T, fait passer des messages de conservation de l’environnement. Passionné de l’écriture et du micro, ses textes vibrent souvent dans des rythmes très engageant de rap et Hip-hop.
Il témoigne avoir débuté sa carrière musicale depuis son enfance lorsqu’il avait encore 10 ans. A ce jour, RIZO-T, 29 ans d’âge, poursuit ses études universitaires en Droit à l’Université de Goma.
« Etant artiste musicien vivant avec handicap, je suis vraiment intéressé par la journée de l’environnement. Je me suis dit qu’il faut que je réserve une chanson pour sensibiliser la communauté à lutter contre le réchauffement climatique.
La lutte contre le réchauffement climatique est une affaire de tous. La personne vivant avec handicap ne doit pas être exclue dans cette dynamique. Tout le monde a le droit de s’impliquer en fonction de sa personnalité, son rôle joué dans le communauté et sans aucune exclusion basée sur l’aspect physique ou un handicap particulier », nous confie l’artiste musicien RIZO-T.
Dans son Tweet du 30 mai 2022, l’organisation Congo Handicap indique que la prise en compte des besoins des personnes en situation de handicap est essentielle pour garantir une action climatique efficace et empêcher que les changements climatiques n’exacerbent pas les inégalités.
Pour Eliode Bakole, un jeune volontaire au sein du YALI Young African Leaders Initiative au Nord-Kivu, les jeunes du monde entier sont tous impactés par les effets du changement climatique. Il appelle à une action globale et inclusive de toutes les couches de la jeunesse : les jeunes indigènes, les jeunes albinos, ceux vivant avec handicap.
« J’ai appris de nouvelles choses aujourd’hui. J’ai travaillé dans de petits groupes de discussions avec des jeunes albinos, des pygmées, des personnes vivant avec handicap. J’ai apprécié la symbiose qui a régné parmi nous. Célébrer la journée de l’environnement avec d’autres groupes de jeunes m’a permis de nouer de nouvelles relations », témoigne Josline Kalemo, étudiante en Faculté d’Agronomie à l’Université de Goma lors de la célébration de la journée de l’environnement à Goma.
En marge de la célébration de la journée de l’environnement, le Consortium EDA « Enable the Disable Action » et FDAPID « Foyer de Développement pour l’Autopromotion des Pygmées et Indigènes Défavorisées » en collaboration avec le Fonds Forestier National FFN, l’Université de Goma UNIGOM et YALI RDC ont organisé une campagne de sensibilisation en milieu universitaire à l’intention des étudiants sur les impacts de changements climatiques.
Cette sensibilisation a permis de montrer l’importance et l’engagement de toutes les parties prenantes à travers des actions inclusives et coordonnées pour un mode de vie plus propre, plus inclusif, plus vert et durable en harmonie avec la nature.
Il sied de noter que c’est depuis décembre 2020 que le président congolais Félix Tshisekedi a planté un baobab symbolique pour lancer le projet scolaire « 1 Milliard d’arbres à l’horizon 2023 ». Un projet qui, selon la presse présidentielle, démontre la détermination du pouvoir en place dans le combat pour le climat.
De nos jours, il est important d’assurer une justice climatique et que la voix des minorités affectées par les chocs climatiques soit entendue.
Daniel Makasi
Journaliste à Goma/RDC
Photo: Plantation de quelques arbres dans la concession du Campus de l’Université de Goma UNIGOM au quartier Lac Vert à Goma.
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