Fabian Oswald a terminé sa maîtrise à l’Institut de Technologie de Kalsruhe en Allemagne. Ses travaux de recherche étaient focalisés sur les activités de Kilimo Media. Il voulait comprendre la structuration de la circulation de l’information dans les émissions agricole en langues locales et déterminer si les théories contemporaines de la communication scientifique pouvaient être observées dans la pratique de la radio agricole par le biais d’une approche d’études croisées. Fabian a eu des entretiens qualitatifs avec des acteurs locaux et des discussions de groupe avec des agriculteurs des comtés de Kajiado, Marsabit et Kitui et de trois stations de radio (Radio Bus, Radio Jangwani et Syokimau FM, respectivement).
Cette illustration montre comment est structuré le flux d’informations dans les émissions agricoles produites en langues locales. En résumé, les stations de radio locales conçoivent une émission agricole en liaison avec un ou plusieurs agents de vulgarisation, qui identifient les sujets cruciaux à traiter dans ces émissions. Pour les entretiens, l’agent de vulgarisation élabore des questions d’actualité. Les agriculteurs écoutent le programme individuellement ou en groupes et posent des questions ou racontent leurs propres expériences par des appels ou des SMS. Ils peuvent également suggérer des sujets sur des questions qui les concernent. Outre le programme radiodiffusé, l’agent de vulgarisation continue également ses activités de vulgarisation classique et se rend dans les communautés agricoles. Cela montre que les agents de vulgarisation, les réalisateurs radio et les communautés agricoles sont des acteurs clé du réseau d’information. Cependant, plusieurs autres institutions gouvernementales et non gouvernementales sont également impliquées dans le flux d’informations. L’agent de vulgarisation est au centre de ce réseau et canalise les informations reçues de tous les autres acteurs. La radio agricole a été conçue pour être un canal de communication indépendant et interactif qui fournit aux agriculteurs une information rapide et peu coûteuse et qui utilise une approche de communication interactive dans laquelle la voix des agriculteurs est entendue. Les résultats montrent que les projets KIMI répondent à ces attentes vis-à-vis de la radio agricole. C’est l’élément d’interactivité et de communication à double sens qui doit être discuté en détail.
L’interactivité est un aspect important de la radio agricole dans les trois cas examinés. Les agriculteurs peuvent interagir avec le programme de radio agricole en utilisant des téléphones portables ou contacter directement l’agent de vulgarisation en appelant son numéro ou lors de visites à la ferme. Sur appel, les agriculteurs peuvent également raconter leurs propres expériences et solutions aux problèmes abordés dans l’émission, voire être invités à participer à un programme et à être entendus à la radio. La combinaison de la radio, des TIC et des langues locales est la seule combinaison permettant aux agriculteurs de communiquer à plus grande échelle qu’au niveau personnel. Cela fait de l’utilisation de la langue locale l’élément de la radio agricole qui, aux côtés des téléphones mobiles, est essentielle pour permettre le dialogue. Il permet aux agriculteurs d’appliquer pleinement leurs connaissances au dialogue en utilisant des termes familiers ou des noms de plantes et d’animaux nuisibles. L’utilisation de la langue locale est essentielle pour la communication des connaissances dans le respect des contextes culturel et social locaux, qui constituent un aspect fondamental du développement durable en milieu rural et sont très appréciés des agriculteurs.
Les partenaires interviewés ont affirmé que les informations agricoles diffusées dans le cadre du programme étaient scientifiquement fondées et que les sources scientifiques étaient utilisées à des fins de validation. Cela indique que, bien que les chercheurs ne participent généralement pas au programme, les sciences agricoles générées par les émissions agricoles génèrent une grande partie des connaissances. L’objectif principal de KIMI est d’améliorer la sécurité alimentaire et financière des agriculteurs grâce à l’utilisation des informations radio, principalement par la communication de connaissances pratiques et applicables. Il peut s’agir d’informations sur les règles d’hygiène de base lors de la traite d’une vache, sur la manière de contrôler certaines mauvaises herbes ou sur une mise à jour des prix des légumes sur le marché. Il est difficile de déterminer quelle partie exacte de ces «paquets» de connaissances est basée sur des découvertes scientifiques. Les informations générées par la recherche scientifique parviennent aux agriculteurs par le biais de la radio.
En conclusion, l’étude de cas portant sur trois projets de radios rurales dans les zones rurales du Kenya montre un réseau de communication faisant intervenir divers acteurs mais centré sur les agents de vulgarisation. Ils remplissent des fonctions clés dans la sélection des sujets, l’identification des agriculteurs modèles, la présentation des informations agricoles en direct et l’interaction avec les agriculteurs, principalement en répondant à des questions. La station de radio peut être de nature communautaire ou commerciale, le facteur déterminant étant son emplacement dans la région et le fait qu’elle produise un contenu pertinent pour la population locale. Le personnel de la radio aide à la facilitation technique du programme radiophonique et apporte son expertise sur les formats de média. L’impression générale est que les agents de vulgarisation voient en la radio un outil qui leur permet d’améliorer de nombreuses difficultés de leur travail et qui permet d’atteindre plusieurs agriculteurs en même temps et avec peu d’efforts financiers et physiques. Leurs relations avec les agriculteurs peuvent être comparées à celles d’un enseignant envers des étudiants, il est courant que les agents de vulgarisation soient qualifiés d’experts. Le responsable de la vulgarisation est responsable de la sélection et de la mise en forme des informations agricoles à partir de sa propre expérience et de diverses sources. Ainsi, le flux d’informations est d’abord acheminé par l’agent de vulgarisation, puis diffusé par l’émission agricole. Les agriculteurs peuvent ensuite donner leur avis ou poser des questions qui parviennent au responsable de la vulgarisation, aux opérateurs radio et aux autres agriculteurs qui écoutent le programme. La radio agricole est donc également un support qui facilite la communication entre agriculteurs, ce qui ne serait pas possible autrement en raison de la distance géographique et du manque d’autres supports.
Étant donné que les informations agricoles communiquées par le biais de la radio agricole ont des sources scientifiques, on peut affirmer que les informations scientifiques sont communiquées à un public, les agriculteurs, par le biais d’un média, la radio. Cela signifie que la communication scientifique est en cours, même si les scientifiques ne sont pas directement impliqués. Le flux d’informations observé est un mélange de modèles de communication scientifique linéaires et bidirectionnels. Par conséquent, la radio agricole ne se révèle pas être un moyen de communication purement unilatéral ou bidirectionnel, mais utilise une combinaison de ces modèles de communication. L’utilisation de la langue locale peut être décrite comme une clé de la participation des agriculteurs et d’une approche de la communication prenant en compte le contexte culturel dans lequel se déroule la communication. Les radios rurales offrent un grand potentiel pour une approche directe de la communication scientifique en mettant en contact les agriculteurs et les chercheurs. Il est probable que cela crée une plate-forme de communication bénéfique pour tous.
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