À la porte d’entrée de la concession d’Eva Abiba se tient un arbre. La maison d’Eva n’est pas un cas exceptionnel à Shelanyili, où elle vit, mais elle est unique comparativement à plusieurs communautés au Ghana.
Généralement, lorsque des projets de reboisement sont réalisés au Ghana, ils impliquent de grandes et denses plantations d’arbres situés près des exploitations agricoles ou des communautés rurales. Cependant, à Shelanyili, un petit village du district de Karaga, dans la région du Nord, c’est le contraire. Chaque ménage a un arbre planté, soit devant, soit derrière sa concession. Lorsque vous regardez partout à Shelanyili, il y a des neems, des karités et des acacias.
À la fin des années 90, la communauté a reçu des semis du ministère de l’Agriculture, qui a également enseigné à ses membres les méthodes de plantation et d’entretien. Les arbres ont désormais atteint leur pleine maturité, et forment une large voûte dans les concessions et les jardins.
L’approche de la communauté à l’égard des arbres qui la bordent diffère également de celle des autres juridictions. Pendant que d’autres communautés consacrent leurs efforts à la reforestation, Shelanyili met l’accent sur la conservation. Elle fut l’une des premières communautés du district à interdire les feux de brousse causés par la chasse qui réduisent le couvert végétal et polluent l’air.
La décision de 1996 d’interdire les feux de brousse a créé la controverse. Des gens des communautés voisines ont protesté, car ils ne pouvaient plus pratiquer ce qui était un mode de chasse traditionnel, surtout en saison sèche. Les affrontements avec les habitants de la localité voisine de Karaga sont fréquents et dégénèrent parfois en violence. Au fil du temps, les tensions se sont apaisées, et l’interdiction a pu être exécutée avec succès avec le soutien du Service des incendies.
En protégeant ses arbres tout en plantant intensivement dans ses concessions, Shelanyili est devenu un modèle pour les villages du district et de la région. Avant, il subissait des inondations et des orages qui arrachaient les toits des maisons, mettant les femmes, en particulier, en danger. Elles avaient perdu l’intimité de leurs maisons et étaient contraintes de vivre avec leurs familles dans une seule pièce.
Au même moment, les feux de brousse détruisaient non seulement la protection de Shelanyili contre les tempêtes de vent, mais ils détruisaient également ses sols. Les rendements des exploitations agricoles diminuaient, tandis que la broussaille brûlée, qui jadis attirait les animaux locaux, ne les attirait plus.
Tout cela a changé. Les maisons ne sont plus décoiffées, les rendements agricoles augmentent et les membres de la communauté, notamment les femmes, bénéficient d’une augmentation de leurs revenus grâce à la vente de noix de karité. Elles n’ont plus également à parcourir de longues distances pour aller chercher du bois de chauffe et de l’eau.
Selon Eva, une habitante de Shelanyili, âgée de 30 ans, sa localité souffrirait moins que d’autres villages de la chaleur de plus en plus intense qui frappe la région grâce aux arbres. « Nous sortons nous asseoir sous les arbres, à l’ombre, » déclare-t-elle.
Shelanyili est l’une des communautés mises en vedette dans un documentaire qui est conjointement réalisé par Zaa FM et Jata FM, avec l’appui de Radios Rurales Internationales. Ce documentaire présentera les mesures d’adaptation au changement climatique que des communautés prennent au Ghana, et les défis qu’elles rencontrent dans leur mise en œuvre, en espérant que d’autres communautés s’inspireront des expériences de Shelanyili.
La décision de Shelanyili d’interdire les feux de brousse et son ingéniosité à planter des arbres près des maisons et des lieux de rassemblement montrent à quel point ces changements peuvent être efficaces. Même avec une petite aide de l’extérieur, lorsqu’une communauté fait preuve de détermination et planifie à long terme, elle peut faire la différence face à la crise climatique.
Le projet À l’antenne pour des solutions fondées sur la nature et l’égalité des genres est un projet quinquennal dirigé par Radios Rurales Internationales en partenariat avec le gouvernement du Canada, qui utilisera des émissions de radio à fort impact pour travailler avec les communautés locales au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire, en Éthiopie, au Ghana, en Ouganda et en Zambie afin de trouver, partager et promouvoir des solutions locales fondées sur la nature et d’amplifier ces solutions auprès d’un réseau de 3 500 radiodiffuseurs et radiodiffuseuses dans 38 pays africains afin qu’elles puissent être répliquées sur tout le continent.