Des filières agricoles aux rouages bien huilés font des communautés rurales prospères. Pourquoi? Parce qu’elles forment de chaînes de valeur qui permettent aux petits exploitants agricoles de tirer le meilleur parti de leur production, chacun de leurs maillons créant de la valeur et augmentant ainsi le revenu dégagé du produit final.
Ces filières sont tantôt courtes, tantôt longues. Prenons l’exemple des champignons. Ils peuvent être cultivés, cueillis, nettoyés puis vendus directement aux consommateurs. Ou bien ils peuvent être cultivés, cueillis, lavés, émincés, déshydratés, réduits en poudre et transformés en un savoureux biscuit au goût de champignon, qui est ensuite emballé, distribué et vendu dans des supermarchés plus ou moins proches.
Mais les choses ne sont pas toujours aussi simples. La situation géographique, les conditions météorologiques ou les perturbations du marché peuvent empêcher les produits d’arriver aux consommateurs, ce qui entraîne des pertes de denrées alimentaires et des baisses de revenu.
C’est pourquoi le FIDA aide les communautés rurales à renforcer les filières pour surmonter ces difficultés. Cette action prend notamment trois formes, comme l’illustrent les exemples suivants.
Un stockage sûr pour des exploitations prospères
Pour préserver la qualité du lait, assurer la réfrigération est nécessaire à chaque étape de la filière. Autrefois, sans moyen fiable à leur disposition pour conserver le lait au frais, les petits producteurs des hautes terres de Türkiye ne tiraient qu’un maigre revenu des produits laitiers et préféraient donc élever leur bétail pour la viande.
Or, avec l’installation de cuves réfrigérées dans 89 villages, tout un monde de nouveaux débouchés s’offrent à eux.
Non pasteurisé, le lait est maintenant analysé puis correctement stocké avant d’être vendu, un processus sécurisé qui préserve son goût mais aussi sa valeur. Un litre qui se vendait autrefois l’équivalent d’à peine 0,25 USD peut atteindre 0,56 USD aujourd’hui.
« Nous avons amélioré la qualité du lait », explique Erol Akar, responsable d’une coopérative locale. « Nous savions qu’il y avait un potentiel à exploiter – cette région, c’est l’avenir du lait. »
La route vers de meilleurs moyens d’existence
Les infrastructures sont l’huile qui permet aux rouages d’une filière de tourner. Routes et véhicules garantissent le transport des produits d’une étape à la suivante: lorsqu’ils font défaut, comme c’est souvent le cas dans les régions reculées, revenus et moyens d’existence en pâtissent.
Au Tadjikistan, dans une zone rurale, une petite rivière posait autrefois un gros problème aux habitants du village voisin, Tuto. En effet, en cas de crues, il n’était plus possible de la traverser sans risque: nombreuses étaient les récoltes qui n’atteignaient pas les installations de stockage, et une partie du bétail se noyait.
Tout a changé lorsqu’une organisation d’usagers locale a construit un pont grâce au soutien du FIDA. Aujourd’hui, les petits exploitants acheminent sans risque leurs produits alimentaires et leur bétail.
« Ce pont est vraiment très important pour nous », confie Marvori Radjabova, qui est une membre de cette organsiation. « Il nous permet de transporter nos récoltes des champs jusqu’aux villages et de faire traverser notre bétail sans crainte ni risque de perte. »
Au même moment, à l’ouest du Rwanda, dans le district de Nyabihu, les petits producteurs laitiers ne pouvaient acheminer qu’une quantité limitée de lait jusqu’aux centres de collecte et de stockage locaux en raison des longues distances à parcourir.
Grâce à des collecteurs de lait, les abacunda, les éleveurs ont pu augmenter considérablement les volumes livrés – et ainsi leurs revenus. Ces intermédiaires recueillent chaque jour le lait de 300 petits éleveurs et le transportent à moto jusqu’aux centres de collecte en moins de deux heures.
Des produits prêts à être commercialisés
En Indonésie, malgré une longue tradition de pêche, la plupart des communautés côtières ne disposent toujours pas des solutions techniques et des ressources nécessaires pour conserver les prises. Résultat: plus d’un tiers de la pêche est perdue ou inutilisable.
Financé par le FIDA, le Projet de développement des communautés côtières change la donne: grâce à lui, ces communautés apprennent à transformer leur poisson pour produire des en-cas, à forte valeur ajoutée. Ainsi une communauté de femmes a-t-elle augmenté de 340 USD son revenu collectif mensuel en produisant des biscuits à base de poisson.
Dans les zones rurales du Nigeria, Carolyn Felix, cultivatrice de patates douces, a connu une réussite similaire. Elle a profité d’une formation suivie dans le cadre du Programme de développement des filières pour changer ses pratiques: elle transforme maintenant ses patates douces en gruau, en biscuits, en farine et en pain, des produits à forte valeur ajoutée qui lui assurent un revenu nettement supérieur.
« Ce programme a vraiment transformé notre vie », explique Carolyn. « Non seulement il nous a motivés, mais il nous a aussi beaucoup appris et nous a permis d’améliorer notre quotidien. »
Or, transformer les produits n’est pas le seul moyen d’accroître leur valeur et leur durée de conservation: l’emballage compte aussi. Au Sénégal, une association d’exploitants a appris à élever, traiter et emballer les huîtres pour les conserver plus longtemps.
« Un panier d’huîtres séchées ne rapporte pas grand-chose », reconnaît Marianne Ngong, membre de cette association. « On gagne beaucoup plus aujourd’hui en les conservant dans des pots en verre. »
Des filières fortes pour des communautés rurales fortes
Les exemples ci-dessus illustrent comment un meilleur fonctionnement de chaque maillon de la filière améliore les moyens d’existence des populations rurales – et comment chacun de ces maillons peut ajouter de la valeur pour permettre aux petits exploitants d’augmenter leurs revenus. Renforcer les filières de produits locaux est essentiel pour accroître la prospérité, non seulement pour les agriculteurs et agricultrices pris individuellement, mais aussi à l’échelle des économies rurales dans leur ensemble.
Article de l’IFAD (Fonds international de développement agricole)