Malgré les avantages bien documentés des innovations en agriculture, des obstacles importants empêchent les agriculteurs de les adopter, notamment : le peu de renseignements parvenant aux agriculteurs isolés, l’inefficacité des services de vulgarisation nationaux, les systèmes de fourniture d’intrants ne répondant pas aux besoins des agriculteurs et des agricultrices. Cela empêche des millions de petits exploitants agricoles d’apprendre et d’appliquer les pratiques agricoles améliorées et efficaces permettant d’accroître la productivité et la sécurité alimentaire des ménages.
Un programme financé par le Centre de recherches pour le développement international (CRDI) et Affaires mondiales Canada, appelé Fonds canadien de recherche sur la sécurité alimentaire internationale (FCRSAI), reposait sur certaines de ces motivations. Le programme a été conçu pour accroître la collaboration entre les agriculteurs, les chercheurs ainsi que les secteurs public et privé, pour régler les problèmes liés à l’insécurité alimentaire et nutritionnelle. Le programme visait principalement à examiner comment appliquer de manière efficace et à grande échelle les innovations en agriculture pour d’atteindre le plus grand nombre de petits exploitants agricoles, principalement des femmes.
L’application à grande échelle comprend la vulgarisation, la répétition et les innovations pour atteindre un plus grand nombre de personnes. Il est particulièrement difficile d’atteindre les agriculteurs pauvres, car ils se trouvent généralement dans des zones éloignées, à l’extérieur de la portée des services de vulgarisation classiques.
Comme il est essentiel d’atteindre les agriculteurs, voici les leçons apprises du FCRSAI au sujet de l’utilisation des TIC pour la réussite à long terme et l’adoption des innovations de manière durable :
- Les agriculteurs doivent avoir accès en temps opportun à des intrants de grande qualité. À elle seule, la vulgarisation est moins efficace pour encourager les agriculteurs à adopter des technologies et des pratiques agricoles améliorées. L’accès à des semences, à des fertilisants et à des produits agrochimiques constitue un élément essentiel. La combinaison des connaissances découlant des services de vulgarisation reçus et l’accès à des intrants et à des services améliorés accroissent la probabilité de l’adoption à long terme.
- Le savoir-faire technique lié à l’utilisation des innovations doit être utile et précis. Par exemple, des renseignements imprécis au sujet des types de variétés ou des sources de marché permettant aux agriculteurs de vendre leurs semences peuvent avoir une incidence négative sur les agriculteurs vulnérables qui ne peuvent prendre que peu de risques. Ainsi, les agriculteurs ne font plus confiance aux sources de renseignements et hésitent à les utiliser de nouveau.
- Les services de vulgarisation doivent être plus interactifs, personnalisés et ils doivent être fournis par un intermédiaire de confiance. Pour que les agriculteurs les adoptent, les innovations doivent montrer de manière probante leur valeur pour ces derniers et leur incidence sur la réduction de la pauvreté. Lorsque ces preuves sont présentées aux agriculteurs par une source de confiance, que les agriculteurs sont mobilisés et qu’ils peuvent poser des questions, ils sont plus susceptibles d’utiliser l’innovation.
- La combinaison de méthodes coordonnées liées aux TIC, plutôt qu’une seule méthode, avec des services en personne et la communication personnelle avec les agriculteurs renforcent l’adoption des innovations. Lorsque les agriculteurs reçoivent de nombreux messages contradictoires de la part de différentes sources du secteur, cela peut avoir une incidence négative sur l’adoption des innovations par les agriculteurs. Comme il a été constaté en Tanzanie, lorsque les services étaient offerts de manière systématique et coordonnée, plutôt que de manière ponctuelle, de la part de différentes organisations, les TIC renforçaient les messages et favorisaient l’adoption des innovations.
- Utiliser des mesures incitatives pour créer l’engouement afin que les agriculteurs adoptent une innovation dès le départ. Dans un premier temps, ces mesures incitatives peuvent être subventionnées par les ONG, les agents de vulgarisation du gouvernement ou le secteur privé (notamment sous la forme de bons d’échange électroniques, de prix, de coupons, de rabais) ou peuvent reposer sur la volonté de payer des agriculteurs, puis être vendus par l’intermédiaire de fournisseurs agricoles ou de vétérinaires, de pôles agricoles ou de marchands à l’exportation. Il est encourageant de voir que les agriculteurs ont indiqué leur volonté de payer pour les services consultatifs SmartEx au Ghana, mais compte tenu des ressources limitées des petits exploitants agricoles, les services de vulgarisation nécessiteront probablement toujours un certain niveau d’investissement public.
- Les outils et les renseignements liés aux TIC doivent être ciblés et adaptés aux agriculteurs et aux agricultrices pour garantir un accès équitable. En général, les femmes sont moins susceptibles que les hommes d’utiliser ou de posséder des technologies numériques. Pour que les pays utilisent les TIC pour encourager l’autonomisation des femmes, les gouvernements doivent être bien informés au sujet du fonctionnement de l’écosystème des TIC, en pratique, des obstacles à l’accès et sur la façon de surmonter les défis. Le renforcement des capacités en matière de TIC peut aider à renforcer les compétences et permettre l’accès aux renseignements afin que les femmes soient traitées sur un même pied d’égalité que les hommes. Par exemple, en Tanzanie et au Ghana, la diffusion d’émissions radio selon un horaire adapté aux agricultrices et les jours de rencontre des groupes d’agricultrices, la coanimation des émissions par des femmes et l’organisation de groupes communautaires d’écoute de la radio réservés aux femmes contribuaient à accroître l’accès des femmes et l’utilisation des renseignements au sujet des innovations.
Pour en savoir plus sur les projets et les leçons tirées du FCRSAI, consultez le www.crdi.ca/fcrsai
Wendy Manchur est administratrice du programme Agriculture et sécurité alimentaire du Centre de recherches pour le développement international (CRDI).
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